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la Transfiguration ; tout le reste ne lui disait rien, et il aimait mieux les peintures d’éventails qu’on expose tous les deux ans que les chefs-d’œuvre enfumés des anciennes écoles ; en un mot, la peinture était une source de jouissances presque fermée pour lui. Il est arrivé que, par complaisance, il a lu une histoire de la peinture pour en corriger le style[1] ; il est allé par hasard au Musée, et les tableaux lui ont rappelé ce qu’il venait de lire sur leur compte. Il s’est mis, sans s’en apercevoir, à ratifier ou à casser les jugements qu’il avait vus dans le manuscrit ; il a bientôt distingué le style des écoles différentes. Peu à peu, et sans dessein formé, il est allé trois ou quatre fois la semaine au Musée, qui est aujourd’hui un des lieux du monde où il se plaît le plus. Il trouve mille sujets de réflexions dans tel tableau qui ne lui disait rien, et la beauté du Guide, qui ne le frappait pas jadis, le ravit aujourd’hui.

Je suis convaincu qu’il en est de même de la musique, et qu’en commençant par apprendre par cœur cinq ou six airs du Mariage secret, l’on finit par sentir la beauté de tous les autres : seulement

  1. J’avais l’idée de l’Histoire de la Peinture depuis le 28 octobre 1818, je crois, contrada dei Rastrelli à Milan. (Note manuscrite de l’ex. Mirbeau.)