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cahier, mon crayon, et je vais, après un long silence, vous parler de notre ami Haydn.

Savez-vous que je vais presque vous accuser de schisme ? Vous semblez le préférer aux chantres divins de l’Ausonie. Ah ! mon ami, les Pergolèse, les Cimarosa, ont excellé dans la partie la plus touchante et en même temps la plus noble du bel art qui nous console. Vous me dites qu’un des motifs de votre préférence pour Haydn, c’est qu’on peut l’entendre à Londres et à Paris comme à Vienne, tandis que, faute de voix, la France ne jouira jamais de l’Olympiade du divin Pergolèse. Sous ce rapport, je partage votre opinion. L’organisation dure des Anglais et de nos chers compatriotes peut laisser naître chez eux de bons joueurs d’instruments, mais leur défend à jamais de chanter. Ici, au contraire, en traversant le faubourg de Léopoldstadt, je viens d’entendre une voix très-douce chanter agréablement la chanson

Nach dem Todt bin ich dein.

Quant à ce qui me regarde, j’aperçois fort bien la malice de votre critique au milieu de vos compliments. Vous me reprochez encore cette légèreté qui, grâce