CHAPITRE LIV
SUITE DE L’ARMÉE
Au reste l’esprit de l’armée a varié : farouche, républicaine, héroïque à Marengo, elle devint de plus en plus égoïste et monarchique. À mesure que les uniformes se brodèrent et se chargèrent de croix, ils couvrirent des cœurs moins généreux. On éloigna ou on laissa languir tous les généraux qui se battaient par enthousiasme (le général Desaix, par exemple). Les intrigants triomphèrent, et, parmi ceux-ci, l’empereur n’osait pas punir les fautes. Un colonel qui fuyait, ou se laissait choir dans un fossé toutes les fois que son régiment allait au feu, était fait général de brigade et envoyé dans l’intérieur. L’armée était si égoïste et si corrompue à la campagne de Russie, qu’elle fut presque sur le point de mettre le marché à la main de son général[1]. D’ailleurs les inepties du major général[2],