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adoré d’elle et étranger en apparence à l’avilissement qui pesait sur l’Espagne depuis quinze années. Ce prince pouvait avoir les faciles vertus de sa position et allait être environné d’hommes intègres attachés à la patrie, inaccessibles aux séductions et soutenus par un peuple inaccessible à la crainte. Tout ce que Napoléon savait du prince des Asturies, c’est qu’en 1807 il avait osé lui écrire pour lui demander la main d’une de ses nièces, fille de Lucien Bonaparte.

En Espagne, après les événements d’Aranjuez, l’enthousiasme était dans toutes les classes. Cependant l’étranger au sein de l’État commandait dans la capitale, occupait les places fortes et se trouvait le véritable juge entre Ferdinand VII et le roi Charles IV, qui venait de révoquer son abdication et d’invoquer le secours de Napoléon.

Dans cette position unique, par un nouveau trait de cette ineptie raisonnante qui caractérise les ministres d’un peuple depuis si longtemps étranger aux progrès de l’Europe, Ferdinand VII résolut de s’avancer au-devant de Napoléon. Le général Savary fit deux courses en Espagne pour presser ce prince d’arriver à Bayonne, mais jamais il ne lui offrit de reconnaître son titre. Les conseillers du