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On pourrait écrire, il est vrai, en se servant de la troisième personne, il fit, il dit. Oui, mais comment rendre compte des mouvements intérieurs de l’âme ? C’est là-dessus surtout que j’aimerais consulter di Fiore.

Je ne continue que le 23 novembre 1835. La même idée d’écrire my life m’est venue dernièrement pendant mon voyage de Ravenne ; à vrai dire, je l’ai eue bien des fois depuis 1832, mais toujours j’ai été découragé par cette effroyable difficulté des Je et des Moi, qui fera prendre l’auteur en grippe, je ne me sens pas le talent pour la tourner. À vrai dire, je ne suis rien moins que sûr d’avoir quelque talent pour me faire lire. Je trouve quelquefois beaucoup de plaisir à écrire, voilà tout[1].

  1. Au lieu de tant de bavardages, peut-être que ceci suffit :
    Brulard (Marie-Henry), né à Grenoble en 1786 (sic), d’une famille de bonne bourgeoisie qui prétendait à la noblesse, il n’y eut pas de plus fiers aristocrates qu’on pût voir dès 1752. Il fut témoin de bonne heure de la méchanceté et de l’hypocrisie de certaines gens, de là sa haine d’instinct pour la gi (on). Son enfance fut heureuse jusqu’à la mort de sa mère, qu’il perdit à sept ans, ensuite les p(rêtres) en firent un enfer. Pour en sortir, il étudia les mathématiques avec passion et en 1797 ou 98 remporta le premier prix, tandis que cinq élèves reçus le mois après à l’école polytechnique n’avaient que le second. Il arriva à Paris le lendemain du 18 Brumaire (9 novembre 1799), mais se garda bien de se présenter à l’examen pour l’école polytechnique. Il partit avec l’armée de réserve en amateur et passa le Saint-Bernard