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21 juin.

Je n’en ai pas moins aimé Lussinge jusqu’à ce qu’il soit devenu riche, ensuite avare, peureux et enfin désagréable dans ses propos et presque malhonnête en janvier 1830.

Il avait une mère avare mais surtout folle, et qui pouvait donner tout son bien aux prêtres. Il songea à se marier ; ce serait une occasion pour sa mère de se lier par des actes qui l’empêcheraient de donner son bien à son confesseur. Les intrigues, les démarches, pendant qu’il allait à la chasse d’une femme, m’amusèrent beaucoup. Lussinge fut sur le point de demander une fille charmante qui eût donné à lui le bonheur et l’éternité à notre amitié : je veux parler de la fille du général Gilly, — depuis Mme  Douin, femme d’un avoué, je crois. Mais le général avait été condamné à mort après 1815, cela eût effarouché la noble baronne, mère de Lussinge. Par un grand hasard, il évita d’épouser une coquette, depuis Mme  Varambon. Enfin, il épousa une sotte parfaite, grande et assez belle, si elle eût eu un nez. Cette sotte se confessait directement à Mgr de Quélen, archevêque de Paris, dans le salon duquel elle allait se confesser. Le hasard m’avait