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être si haut, avait l’âme tragique, mais il était si bête qu’il Lombait dans les affectations les plus ridicules. Je soupçonne que, outre l’éclipse totale d’esprit, il avait encore cette sensibilité indispensable pour ensemencer les succès, et que j’ai retrouvée avec tant de peine jusque chez l’admirable et aimable Béranger.

Talma donc fut probablement servile, bas, rampant, flatteur, etc., et, peut-être, quelque chose de plus envers Mme  de Staël qui, continuellement et bêtement aussi occupée de sa laideur (si un tel mot que bête peut s’écrire propos de cette femme admirable) avait besoin, pour être rassurée, de raisons palpables et sans cesse renaissantes.

Mme  de Staël, qui avait admirablement comme un de ses amants, M. le prince de Talleyrand, l’art du succès à Paris, comprit qu’elle aurait tout à gagner à donner son cachet au succès de Talma, qui commençait à devenir général et à perdre par sa durée le peu respectable caractère de mode.

Le succès de Talma commença par de la hardiesse ; il eut le courage d’innover, le seul des courages qui soit étonnant en France. Il fut neuf dans le Brutus de Voltaire et bientôt après dans cette pauvre amplification : Charles IX de M. de Ché-