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pour m’amuser. Il n’y a rien de si plat (pour moi du moins) que la route par Abbeville, Montreuil-sur-Mer, etc. Ces longues routes blanches se dessinant au loin sur un terrain platement ondulé auraient [été] mon malheur sans le bavardage d’Edwards.

Cependant les murs de Montreuil et la faïence du déjeuner me rappelèrent tout à fait l’Angleterre.

Nous voyagions avec un nommé Smidt, ancien secrétaire du plus petitement intrigant des hommes, M. le conseiller d’État Fréville, que j’avais connu chez Mme Nardot, rue des Ménars, 4. Ce pauvre Smidt, d’abord assez honnête, avait fini par être espion politique. M. Decazes l’envoyait dans les congrès, aux eaux d’Aix-la-Chapelle. Toujours intriguant et à la fin, je crois, volant, changeant de facteur tous les six mois, un jour Smidt me rencontra et me dit que, comme mariage de convenance et non d’inclination, il allait épouser la fille du maréchal Oudinot, duc de Reggio, qui, à la vérité, a un régiment de filles, et demandait l’aumône à Louis XVIII tous les six mois.

— Épousez ce soir, mon cher ami, lui dis-je tout surpris.

Mais j’appris, quinze jours après, que M. le duc Decazes, apprenant malheureu-