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deux choses : à garder sa place et à s’amuser. Vos ministres n’étaient-ils pas des gens prédestinés, que ces deux occupations n’en fissent qu’une seule ? Les femmes avaient de l’importance, même aux yeux de la vieillesse et du clergé ; elles étaient familiarisées d’une manière étonnante avec la marche des affaires ; elles savaient par cœur le caractère et les habitudes des ministres et des amis du roi.

« À mesure que vous allez devenir plus constitutionnels, vos femmes deviendront moins aimables : je crois même avoir déjà remarqué cette nuance. Vous avez beaucoup plus de bonnes mères de famille qu’en 1775 ; et il n’y a rien d’ennuyeux au monde comme une bonne mère de famille. Vous sentez que chez nous, où rien ne se fait sous la cheminée du ministre, mais où tout est discuté à fond, et souvent trop à fond, les femmes ne songent guère à captiver le premier ministre ; à quoi bon ? Lorsque j’arrivai en France, le règne de M. de Choiseul venait seulement de finir. La femme qui pouvait lui paraître aimable, ou seulement plaire à la duchesse de Grammont, sa sœur, était sûre de faire tous les colonels et tous les receveurs généraux qu’elle voulait.

« Une suite irrémédiable de la liberté est donc de faire considérer les femmes