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un sens tout différent de celui qu’il leur attribue, et souvent fort plaisant. Plus nous connaissons la langue du Dante, qui est resté notre poëte le moins copiste et par conséquent le plus touchant, plus nous rions. L’amour-propre du Florentin a sans cesse une prétention offensante pour le mien, et toujours le mien a le vif plaisir de voir cette prétention se casser le cou (quella pretenzione rompersi il collo). Un habitant des bords de l’Arno veut-il parler de la partie nord de Saint-Domingue, il vous dit gravement : Le parte deretane dell’ isola (éclats de rire dans le salon : ces mots veulent dire le derrière de l’île). Le cardinal a cité sept ou huit exemples qui peuvent se raconter ; mais écrits, et en français, ils seraient indécents. Un jeune homme instruit, continue Son Éminence, échappé de Florence et arrivant à Bologne, est pour nous une bonne fortune ; si jamais vous avez le bonheur de rencontrer cette espèce de fat littéraire, je vous conseille de le jeter dans l’analyse des mouvements délicats du cœur humain ; quelque vulgaires que soient ses idées, son langage vous amusera. Les marchands de Florence de l’an 1400, si riches, si amoureux de l’architecture, si occupés de leurs haines contre les nobles, ne se doutaient pas, il faut l’avouer, de ces belles discussions qui rem-