Italie ; chez le bourgeois cela passe pour dangereux, et l’est en effet ; parmi les nobles, que la police n’ose attaquer[1], on trouve qu’il y a de la sottise à exciter chez les auditeurs de la haine impuissante, c’est-à-dire un sentiment malheureux. On se dit dans tous les genres : Jouissons de la vie telle qu’elle est ; ou plutôt on a cette habitude, et l’on n’en parle pas ; d’ailleurs, il serait assez dans le génie de la société italienne de placer le beau parleur dans un dilemme fâcheux : « Puisque vous parlez si bien, agissez ; il y a demain telle occasion d’agir. »
Dans un pays où la vengeance a été une passion généralement répandue, jusque vers la fin du dix-septième siècle, époque où la fermeté des caractères est tombée si bas, qu’elle ne peut plus atteindre même à la vengeance, rien n’est plus méprisé que les paroles menaçantes[2]. Il n’y a pas de duel, et la menace ne conduit à rien qu’à mettre tout au plus votre ennemi sur ses gardes.
- ↑ Depuis 1820 et la terreur amenée par le carbonarisme, les nobles eux-mêmes sont attaqués : c’est un prêtre noble qui a été pendu à Modène vers 1821. La royauté a commis là une faute immense, et qui ne tend à rien moins qu’à réunir les Italiens et ôter la haine avec laquelle le bourgeois paye les dédains du noble.
- ↑ Je citerai encore ici, en témoignage de ce que j’avance, les admirables Mémoires de Benvenuto Cellini ; c’est le livre qu’il faut lire, avant tout, lorsqu’on s’achemine vers l’Italie, et ensuite le président de Brosses.