Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, II, 1927, éd. Martineau.djvu/130

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

gager à passer la journée de demain à Castel Fiorentino, n’a eu aucun succès. — « La beauté du pays le 1er février ! a répondu l’un des paysans ; monsieur veut nous faire un compliment », etc., etc. Je n’avais fait cette proposition indirecte que pour ne pas manquer à la fortune. Il eût été par trop fou d’espérer que je pourrais persuader la vérité à ces paysans, c’est-à-dire que c’étaient les grâces de leur esprit, la politesse si originale de leurs manières, et non quelque projet ridicule sur la beauté de leurs femmes, qui, par une tramontana abominablement forte et perçante, me retenaient deux jours dans un trou tel que Castel Fiorentino. Je n’entreprends pas de description de ma soirée ; je sens trop que la seule manière de la peindre serait de rapporter les contes délicieux qui en ont fait le charme. Comme ce mot est faible ! qu’il est mal d’en avoir abusé ! Les six heures de cette soirée se sont envolées pour moi comme si j’avais joué au pharaon en bonne compagnie ; j’étais tellement occupé, que je n’ai pas eu un instant de langueur pour réfléchir sur ce qui m’arrivait.

Je compare cette soirée à celle que je passai à la Scala, le jour de mon arrivée à Milan : un plaisir passionné inondait mon âme et la fatiguait ; mon esprit faisait des