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agité par aucune nuance de passion ? laissez vos traits au repos, si l’on me permet cette expression. C’est alors que les beaux traits des femmes italiennes prenaient pour moi, étranger, l’air sombre et presque terrible. Le général Bubna, qui a été en France, et qui joue ici le rôle d’esprit léger et à bons mots, disait ce soir : « Les femmes françaises se regardent entre elles, les Italiennes regardent les hommes. » C’est un homme très-fin, qui a le secret de se faire bien venir, tout en étant le chef de la tyrannie étrangère.

Avant ce bal, je n’avais jamais vu la vanité en Italie. On danse successivement une valse, une monférine et une contre-danse française. On a commencé à arriver à dix heures. Jusqu’à minuit, la vanité a régné seule, excepté dans les beaux traits de madame ***. On dit que son mari lui a déclaré que si Frascani qu’il a la bonté de redouter encore (Frascani et madame *** sont d’accord depuis deux ans), était au bal, il l’emmènerait, pour tout le carnaval, à sa campagne si sauvage de Trezzo. Madame *** a averti Frascani, qui n’a pas paru de toute la soirée. Depuis onze heures que l’on m’a donné cet avis, jusqu’à deux qu’elle a osé quitter le bal, l’expression de la gaieté, du contentement, ou même de la simple