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nuance de grec francisé, comme l’Iphigénie de Racine imite celle d’Euripide. »

La rue Dei Nobili, à Milan, a une fort belle architecture, vous dit-on ; entendez qu’elle est horriblement triste et sombre. Je ne rirais pas de huit jours si j’habitais le palais Arconati.

Ces palais me rappellent toujours le moyen âge, les conspirations sanglantes des Visconti (1301) et les passions gigantesques du quatorzième siècle. Mais je suis le seul à avoir de ces idées. Les possesseurs de ces palais si grandioses soupirent pour un petit appartement sur le boulevard de Gand, à Paris. Ce qu’il y a de plus semblable aux Français ici, ce sont les gens fort riches. Ils ont de plus que nous l’avarice, qui est une passion très-commune parmi eux, et qui lutte plaisamment avec une forte dose de petite vanité. Leur seule dépense, ce sont les chevaux, j’en ai vu plusieurs de trois, quatre, cinq mille francs. Un fat milanais penché sur son cheval forme un ensemble bien plaisant. J’oubliais de dire que tous les jours, à deux heures, il y a Corso, où tout le monde paraît à cheval ou en voiture. Le Corso a lieu à Milan, sur le bastion, entre la Porta Rense et la Porta Nova. Dans la plupart des villes d’Italie, c’est la rue principale