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nous marchons dans une rue privée de réverbères, et que nous courons le risque de nous égarer, de ne plus retrouver notre auberge, et peut-être d’être volés. Voilà ce qui m’est arrivé ce soir, l’abord du compatriote est mortel pour moi.

Comment expliquer cet effet nerveux et cet agréable pouvoir de tuer le plaisir des beaux-arts que possède l’amabilité française ? Est-elle jalouse d’un plaisir qu’elle est impuissante à partager ? Je crois plutôt qu’elle le trouve une affectation ridicule.

27 octobre. — Madame Marini m’a procuré un billet pour le bal que les négociants donnent ce soir à leur casin de San Paolo. Rien n’a été plus difficile. Avec mon billet, et en parlant milanais serré, je viens d’engager le portier à me laisser voir le local. L’air de bonhomie qu’il faut prendre ici et ma qualité de Français ont plus fait que la mancia (l’étrenne).

Les riches négociants de Milan, dont le bon sens tranquille et le luxe tout en agréments réels et sans aucun faste me rappellent le caractère hollandais, se sont réunis au nombre de quatre cents pour acheter à fort bon compte, dans la rue San Paolo, ce qu’on appelle ici un palazzo. C’est un grand hôtel, bâti en pierres que