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conversation continue comme si c’était un valet qui fût entré. — Plaisante manière de se féliciter, s’écrierait un de mes amis de Paris, je ne vois là que de la grossièreté. — À la bonne heure, mais c’est pour moi la plus douce récompense des deux ans que j’ai passés autrefois à apprendre, non-seulement l’italien de Toscane, mais encore le milanais, le piémontais, le napolitain, le vénitien, etc. On ignore, hors de l’Italie, jusqu’au nom de ces dialectes, que l’on parle uniquement dans les pays dont ils portent le nom. Si l’on n’entend pas les finesses du milanais, les sentiments comme les idées des hommes au milieu desquels on voyage restent parfaitement invisibles. La fureur de parler et de se mettre en avant, qu’ont les jeunes gens d’une certaine nation, les fait prendre en horreur à Milan. Par hasard, j’aime mieux écouter que parler ; c’est un avantage, et qui compense quelquefois mon mépris peu caché pour les sots. Je dois avouer, de plus, qu’une femme d’esprit m’écrivait à Paris que j’avais l’air rustique. C’est peut-être à cause de ce défaut, que la bonhomie italienne a si vite fait ma conquête. Quel naturel ! quelle simplicité ! comme chacun dit bien ce qu’il sent ou ce qu’il pense au moment même ! Comme on voit bien que personne