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musique ici ; les belles voix sont ailleurs. J’ai été tout à la société et à la peinture. Grâce à de sages conseils, je me suis lié d’abord avec les hommes. Ma plus belle conquête, c’est monseigneur le cardinal Lante, légat de Bologne, c’est-à-dire vice-roi tout-puissant. Je n’avais parlé de ma vie qu’au cardinal M***, qui m’avait semblé commun et souvent grossier. Le cardinal Lante est au contraire un grand seigneur, obligé seulement par son habit noir à passepoils rouges, à certaines convenances qui ne le gênent pas deux fois par soirée. Je compare, dans mon esprit, ce grand seigneur italien à l’aimable général Narbonne, mort à Wittemberg, où à tel grand seigneur empesé de la cour de Napoléon. Quel naturel ! quelle aisance dans les façons de monseigneur le cardinal Lante ! Son frère est duc à Rome, et lui a le pouvoir ici.

Je n’ai presque pas trouvé de fats, à mon grand regret. Je suis contrarié quand je n’ai pas un ami fat à qui montrer mon nécessaire ; cette caisse pesante qui n’est bonne qu’à me faire honneur en pays étranger. La race des fats anglais et français, ces gens nés pour s’habiller, galoper d’une certaine manière, et paraître dans les lieux approuvés par le bon goût, n’a pas encore passé le Pô. Raconter ses bonnes fortunes rend peut-être un homme dési-