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dont je n’oublierai jamais le contour noble et tendre. Je quittai ce lieu funeste ; cinq ans après, un détachement de mon régiment accompagnant l’empereur à son couronnement comme roi d’Italie, je me fis conter toute l’histoire. J’appris que le mari jaloux, le comte ***, avait trouvé un matin, accrochée au lit de sa femme, une montre anglaise appartenant à un jeune homme de la petite ville qu’ils habitaient. Ce jour même, il la conduisit dans le château ruiné, au milieu des bois de la Sesia. Il ne prononça jamais une seule parole. Si elle lui faisait quelque prière, il lui présentait en silence la montre anglaise qu’il avait toujours sur lui. Il passa près de trois ans seul avec elle. Elle mourut enfin de désespoir, à la fleur de l’âge. Son mari chercha à donner un coup de couteau au maître de la montre, le manqua, passa à Gênes, s’embarqua, et l’on n’a plus eu de ses nouvelles. » (De l’Amour, t. I, page 129.)

Je reviens d’une course aux bains de la Poretta. J’ai une provision de miracles et d’anecdotes ; mais mon imprimeur ne se soucie pas d’imprimer les plus piquantes.

Le voyageur qui ne sentira pas la vérité de ces paroles d’Alfieri ne comprendra jamais ce pays : « Che più ? La moderna Italia, nell’ apice della sua viltà e nullità