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grâce de l’expression, piquant des réticences, etc., doit être perdu avec des gens qui ne parlent que de ce qui les intéresse, et qui en parlent fort sérieusement, fort longuement, avec beaucoup de détails passionnés et pittoresques. Chaque homme étant ici un être un peu sauvage, tantôt silencieux, tantôt furibond, et qui a plusieurs choses qui l’intéressent profondément, personne n’a besoin de chercher dans la conversation une vaine apparence de chaleur et une cause d’émotions. Les passions d’un Italien : la haine, l’amour, le jeu, la cupidité, l’orgueil, etc., ne lui donnent que trop souvent un intérêt déchirant et des transports incommodes. La conversation n’est ici que le moyen des passions ; rarement est-elle par elle-même un objet d’intérêt. Ce petit ensemble de faits, je ne l’ai jamais vu comprendre par un seul Français.

Accoutumé qu’il est dès l’enfance à observer si les gens qu’il adore ou qu’il exècre lui parlent avec sincérité, la plus légère affectation glace l’Italien, et lui donne une fatigue et une contention d’esprit tout fait contraires au dolce far niente. Par ces mots célèbres, dolce far niente, entendez toujours le plaisir de rêver voluptueusement aux impressions qui remplissent son cœur. Ôtez le loisir à l’Italie, donnez-lui le