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votre figure étrangère ne troublera plus la société. Un Français est un animal tellement rare et si estimé, que, dès ce moment vous serez l’objet de toutes les curiosités ; vous aurez créé un intérêt véritable chez tous ces personnages sombres qui, les premiers jours, vous considéraient d’un air si tragique. Si telle est votre habileté et votre inclination, voilà le moment, et non pas plus tôt ni plus tard, d’essayer de paraître aimable à une des femmes de la société ; à une seule, entendez-vous ? Mais voici encore un mot qui traduit bien mal ma pensée ; être aimable, en Italie, veut dire à peu près le contraire des idées que ce son réveille chez un Parisien. Il faut, par exemple, ne parler d’abord qu’avec les yeux, et dépouiller ce langage de toute audace ; il faut de grands moments de silence, et, quand on parle, bien plus de pensées touchantes que de choses piquantes. Une réflexion tendre sur la délicieuse expression d’amour dans le premier duetto du Mariage secret vous avancera bien plus que le mot le plus plaisant. L’esprit et le degré d’éveil où il faut se tenir pour renvoyer la balle à propos met une femme dans la situation où il faut qu’elle ne soit pas pour que vous puissiez lui plaire. L’effet assuré de l’esprit, en Italie, est de rendre la conversation sèche. Il est facile de voir que tout ce qui est