national. Le poëte de Belloy avait eu l’idée lucrative, depuis exploitée par d’autres, de se faire le flatteur de ses concitoyens. Le duc d’Ayen se moquant un jour de cette tragédie : « Vous n’êtes donc pas bon Francais ? lui dit le roi Louis XV. — Plût à Dieu, sire, que les vers de la tragédie le fussent autant que moi ! »
Le sage Turgot qui aimait son pays, et ne voyait dans la flatterie que le commerce d’un fripon avec un sot, donna le nom de patriotisme d’antichambre à l’engouement des dupes qui admiraient les grossiers compliments du sieur de Belloy.
Bonaparte imita de Belloy, et lorsqu’il voulut les asservir, salua les Français du nom de grand peuple ; lui-même se glorifie de ce tour d’adresse ; il trouve indigne que l’on avoue, en écrivant l’histoire, les désavantages ou les torts de son pays[1].
Il n’est pas de mérite si mince qu’il soit, qui ne se trouve ici sous la protection de quelque patriotisme municipal ; car enfin le plus plat pédant a une patrie. En France, si un auteur est moqué, c’est surtout dans son pays.
- ↑ La théorie du patriotisme d’antichambre, tel qu’on le
pratique chaque jour envers les cantatrices qui ne sont
pas nées en France, se trouve tout entière dans Virgile :
........Pallas quas condidit arces
Ipsa colat : nobis placeant ante omnia silvæ.
Eglog. II.