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cinq neveux qui ont été fort mêlés dans les affaires de notre révolution. Ce sont de braves patriotes, grands ferrailleurs, toujours dans les salles d’armes, toujours parlant de leurs prouesses. Ces cinq frères, fort ennuyeux pour tout le monde, ne seraient pas fort commodes pour un amant. Ils admirent beaucoup l’esprit de leur oncle, et se sont mis aussi, et pour leur propre compte, à garder leur cousine, qui se moque d’eux du matin au soir. Ils s’imaginent que l’honneur de leur noble famille serait à jamais entaché si elle avait un amant. — Je trouve, très-belle marquise, cette manière de voir fort commune parmi les gentilshommes de ce pays, bien différent du nôtre, et en cela ils me semblent barbares. Donna Fulvia me rappelait que les cinq cousins de donna Lauretta habitent le palais de son père, et que l’imprudent qui aurait la hardiesse d’y pénétrer y laisserait la vie ; il trouverait cinq épées devant lui ; et peut-être six, le vieux prince C*** étant bien homme à l’attaquer en brave, ou, vu son âge, à faire un mauvais parti à l’amant, surtout si celui-ci n’était pas aussi noble que lui. Malgré tous ces raisonnements faits par une femme d’esprit, à qui rien n’échappe, j’avoue que je croyais peu à son dire. L’on ne contrarie pas impunément les lois de la nature, surtout en ce pays voisin