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lâche[1] ; et le climat ayant donné du ressort a ces gens-ci, par le loisir, par les jouissances faciles, que la générosité de la nature verse à pleines mains, même au plus pauvre ; ces paysans ne sont pas simplement grossiers et méchants, comme les sujets de tel petit prince d’Allemagne, mais s’élèvent jusqu’à la vengeance, à la férocité et à la finesse. La perversité du petit prince allemand est secondée par la sévérité du climat ; le paysan hessois, privé de sa chaumière, en hiver, est par là condamné à mort. J’ai deux ou trois histoires de voleurs à faire frémir, si l’on considère les cruautés affreuses, mais à frapper d’admiration, si l’on est assez philosophe pour voir le génie de ces gens-là et leur sang-froid. Ils me rappellent la Roche-Guinard et les brigands espagnols de Cervantes. Maïno, voleur d’Alexandrie, a été l’un des hommes les plus remarquables de ce siècle, il ne lui manque que les quatre pages dans la biographie que le hasard accorde au plus plat sous-préfet. Mais qu’importe la vaine notation des hommes aux faits existant dans la nature ? Nos ancêtres grossiers ne savaient pas voir

  1. De 1300 à 1440, cruautés des Visconti ; en 1758, Gianone meurt en prison dans la citadelle de Turin ; en 1799, supplices à Naples. Plus tard, les seuls progrès de la philosophie et la crainte de l’opinion s’opposent à ce qu’on suive certains conseils. Rome, 1814, C. Alb.