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plissent les rues de Pavie ne sont point couleur de rose comme ceux de Gottingue ; leur œil ne semble point égaré dans la contemplation tendre du pays des chimères. Ils sont défiants, silencieux, farouches ; une énorme quantité de cheveux noirs, ou châtain foncé, couvre une figure sombre dont la pâleur olivâtre annonce l’absence du bonheur facile et de l’aimable étourderie des jeunes Français. Une femme vient-elle à paraître dans la rue, toute la gravité sombre de ces jeunes patriotes se change en une autre expression. Une petite maîtresse de Paris, arrivant ici, aurait une peur mortelle ; elle prendrait tous ces jeunes gens pour des brigands. C’est pour cela que je les aime. Ils n’ont aucune affectation de douceur, de gaieté, et encore moins d’insouciance. Un jeune homme qui se vante d’être poco curante, me semble un monsieur du sérail fier de son état. La haine pour les Tedesk est furibonde parmi les étudiants de Pavie. Le plus considéré est celui qui a pu, de nuit, dans une rue peu fréquentée, donner une volée de coups de canne à quelque jeune Allemand, ou le faire courir, comme ils disent. On pense bien que je n’ai vu aucun de ces exploits ;

    curieux de voir, en six mois de temps, Gottingue, Pavie et le parterre de l’Odéon (1826).