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lie. En France, le despotisme de Napoléon était plus vénéneux ; il craignait les livres et le souvenir de la république, le seul que le peuple ait gardé ; il redoutait le vieil enthousiasme des jacobins. Les jacobins d’Italie s’étaient traînés à la suite des victoires de Bonaparte, et n’avaient jamais sauvé la patrie comme Danton et Carnot. La finesse et la force du moyen âge n’existent plus ; les saint Charles Borromée ont tué ces grandes qualités. Les Italiens ne sont plus conspirateurs que dans Machiavel. M. Bettoni, le libraire, a fait sa fortune en sachant voir cette mode de livres ; aussitôt qu’elle éclata, il donna une édition d’Alfieri en quarante-deux volumes in-8°. La liste des souscripteurs est à peu près celle des employés, gens supérieurs, choisis par Prina et Napoléon. Ils étaient remarquables moins par le génie et l’enthousiasme que par l’esprit d’ordre et par l’activité continue, qualités fort rares chez un peuple passionné, esclave de la sensation du moment. Le dévouement et l’énergie, qui ne se trouvent guère parmi les employés français, comme on a pu le voir à l’approche du Cosaque, n’étaient point rares en Italie. Napoléon a dit que c’est là qu’il a été le mieux servi ; mais il ne leur avait pas volé leur liberté et refait le trône. Les fils de ses employés forment l’élite