Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, I, 1927, éd. Martineau.djvu/171

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sa maîtresse. La jalousie terrible du gouverneur de Milan l’a obligé à prendre la fuite au milieu de la représentation de l’opéra d’Achille de Métastase. M. Locatelli[1] a joué avec tout le feu possible et une bonhomie de ridicule parfaite le rôle du soprano dont la vanité et la sottise se disputent toutes les démarches ; il a même chanté un grand air. Le soprano obtient sa grâce du gouverneur, en lui cédant la prima donna à laquelle il ne songe déjà plus. À la fin, quand il a le plaisir, maintenant objet de tous ses vœux, de reparaître sans robe d’indienne et dans son costume d’Achille complet, aux yeux des habitants de Barlassina, et surtout devant le dilettante son amant, les accès de rire fou ont interrompu les acteurs pendant cinq minutes.

Les sopranos sont sujets à une certaine légèreté qui leur fait changer de passion comme les enfants. M. Locatelli a fort bien saisi ce trait de caractère. Il est auteur de cette petite comédie qui serait digne de Potier et du Gymnase, si notre parterre avait l’idée de la sottise d’un soprano et de la prepotenza d’un gouverneur italien de l’ancien régime.

Le rire italien n’est jamais, pour le spec-

  1. Je ne parle jamais politique à aucun de mes amis. La plupart me croient ministériel.