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jolies femmes, enfin avec les millionnaires. »

À présent que j’ai un peu suivi ce conseil, ce qu’il y a de plus agréable pour moi, à Milan, c’est de flâner. Voici mon plan de campagne à l’usage des lecteurs qui font ou ont fait ce joli voyage. En partant de la Scala, je prends la rue de Sainte-Marguerite. Je passe avec respect devant cette police qui peut tout sur moi, par exemple, me faire partir dans deux heures, mais où l’on a toujours été fort poli à mon égard. Je dois des remercîments à don Giulio Pagani. Je regarde les gravures nouvelles chez les marchands d’estampes voisins de la police. S’il y a quelque chose d’Anderloni ou de Garavaglia, j’ai grand’peine à ne pas acheter. Je vais à la place des Marchands, bâtie au moyen âge. Je regarde la niche vide d’où la fureur révolutionnaire précipita la statue de l’infâme Philippe II. J’arrive à la place du Dôme. Après que mes yeux, déjà montés aux arts par les gravures, ont pris plaisir à considérer ce château de marbre, je suis la rue des Mercanti d’oro. Les beautés vivantes que je rencontre viennent me distraire de celles des arts ; mais la vue du Dôme et des gravures m’a rendu plus sensible à la beauté, et plus insensible à l’intérêt d’argent et à toutes les idées désen-