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que vous soyez mort, et j’irai annoncer votre mort à la princesse N***. Vous diriez encore : Ces Italiens sont des assassins, si je vous faisais poignarder, comme il m’est facile, par mes buli. Battez-vous donc, homme lâche, et qui ne savez qu’offenser[1] ! » Tout cela m’était conté en présence de l’homme qui servit de témoin à madame R***. J’ai toujours cru, ajoute-t-il, que la Teodolinda était résolue à mourir. Le fait est que, malgré sa jeunesse et la finesse charmante de ses traits, elle est restée trois ans inconsolable, chose étonnante dans un pays où la vanité n’entre pour rien dans la constance des résolutions. Elle s’occupait uniquement à apprendre le latin et l’anglais qu’elle montrait à ses filles. Quand ce témoin n’a plus été dans la loge, on a dit qu’il passait, à l’époque du combat, pour un amant dédaigné par Teodolinda, et qu’il lui proposa d’ôter à Malclerc le prétexte de la différence des sexes, si elle voulait le prendre pour son chevalier, ce qu’elle refusa.

  1. Les buli, gens hardis et adroits, se louaient, vers 1775, pour assassiner. Voir le Voyage de M. Roland (le ministre). On prétend qu’on en trouverait encore, au besoin, dans les environs de Brescia. J’ai entendu un jeune homme menacer sérieusement son ennemi de le faire assassiner par ses buli. La gendarmerie de Napoléon avait comprimé ces braves gens.