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ce qu’ils s’imaginent qu’étaient ces règles. Ils se fâchent encore plus contre Canòva, qui d’abord n’a pas l’honneur d’être mort depuis trois cents ans, et qui, ayant eu le bonheur insigne d’être contemporain de M. David, a négligé un si grand avantage et ne s’est pas fait de son école. J’ai entendu vingt fois M. Denon, cet aimable Français, dire que Canòva ne savait pas dessiner. Michel-Ange et Canòva seraient les plus grands criminels s’il n’y avait pas un malheureux, nommé le Corrége, dont les tableaux, grands comme une feuille de papier, ont l’insolence de se faire payer cent mille francs, et cela sous nos yeux, tandis que les chefs-d’œuvre du grand homme, grands comme une chambre, languissent au Luxembourg[1]. À propos de Corrége, M. Reina m’a mené voir le pauvre Appiani, qui, depuis sa dernière apoplexie, a perdu la mémoire et pleure souvent. Au retour, chose incroyable chez un bibliophile, M. Reina m’a prêté un livre : ce sont les curieux, quoique bien minutieux, mémoires du père Affô sur le Corrége. Le père Affô s’occupera du même travail pour Raphaël ; il ira passer quatre ans à Urbino.

  1. Je respecte beaucoup le caractère de M. David, il ne se vendit pas comme un homme de lettres. Ses tableaux ne font pas plaisir à l’œil ; ils seraient peut-être bons sous la latitude de Stockholm.