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ter une beauté comme avaient fait les Grecs. Quel chagrin pour les pédants ! Aussi l’insulteront-ils encore cinquante ans après sa mort, et sa gloire n’en croîtra que plus vite. Ce grand homme qui, à vingt ans, ne savait pas l’orthographe, a fait cent statues, dont trente sont des chefs-d’œuvre. Michel-Ange n’a qu’une seule statue égale à son génie, le Moïse à Rome.

Michel-Ange connut les Grecs comme le Dante Virgile. Ils admirèrent comme ils le devaient, mais ne copièrent point ; aussi l’on parle d’eux après des siècles. Ils resteront le poëte et le sculpteur de la religion catholique, apostolique et romaine. Il faut savoir qu’en 1300, lorsque cette religion était brillante de force et de jeunesse, ce n’était pas tout à fait la chose gracieuse que peint le Génie du Christianisme. Voyez le massacre de Césenne[1].

Les artistes français, élèves de David et dignes compatriotes de la Harpe, jugent Michel-Ange d’après les règles de la sculpture grecque, ou, pour dire vrai, d’après

  1. Lire les trois premiers volumes de l’excellente Histoire de Toscane de Pignotti, bien supérieur à M. Sismondi. Pignotti est aussi vrai que pittoresque. Pour l’histoire de l’Église, en Italie, voir le véridique Potter et la Vera idea della Santa Sede de M. Tamburini. Une satire aimable n’est point de l’histoire, et Voltaire ne vaut rien parlant de l’Église.