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m’a brouillé avec la neige, non à cause de mes périls, mais par le spectacle hideux de l’horrible souffrance et du manque de pitié. À Wilna, on bouchait les trous dans le mur de l’hôpital avec des morceaux de cadavres gelés. Comment, avec ce souvenir, trouver du plaisir à voir la neige ?

En descendant de sédiole, je suis allé au foyer de la Scala entendre la répétition de Maometto, musique M. Winter ; c’est un Allemand célèbre. Il y a une prière sublime chantée par Galli, la Festa et la Bassi. On attend Rossini, qui va travailler sur le sujet de la Pie voleuse, que M. Gherardini arrange en italien. On dit que cet opéra s’appellera la Gazza ladra. C’est, ce me semble, un triste sujet et bien peu fait pour la musique. On dit beaucoup de mal de Rossini. C’est un paresseux, il vole les entrepreneurs, il se vole lui-même, etc., etc. Oui, mais il y a tant de musiciens vertueux qui me font bâiller ! — Hier, à la messe aux Servi, l’orgue a exécuté divinement les cantilènes les plus passionnées de Mozart et de Rossini : Cantare pares.

Que de gens intéressés à dire des horreurs d’un homme de génie qui se moque de toutes les supériorités sociales ! — On peut dire que, dans ce siècle de louanges mendiées, de compérage et de journalisme,