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avancées, il me déclara aussitôt qu’il fallait que je quittasse sa maison, où il ne consentirait jamais à recevoir un rebelle, un excommunié ! J’essayai de calmer ses transports, en lui alléguant les motifs qui m’avaient déterminé, et protestant qu’il était possible de servir Napoléon sans cesser d’être un bon catholique. Je fis de l’éloquence en pure perte : « Non, s’écriait-il, non, il est impossible de servir deux maîtres à la fois ; renonce à tes projets, romps un engagement criminel, il en est temps encore ; retire-toi à la campagne pour échapper aux séductions des pervers. » De mon côté, je fus inébranlable, j’avais goûté du monde et de ses plaisirs, et cette courte épreuve avait affermi ma résolution. Toutefois mon oncle n’osa pas s’armer de violence dans la crainte de devenir suspect au gouvernement français ; il capitula et consentit à m’allouer quatre écus par mois, à condition cependant que j’irais loger ailleurs, ce que je fis dès le lendemain.

À peine arrivés à Rome, les Français se signalèrent par des excès, en dépit des lettres par lesquelles le secrétaire d’État du pape ne cessait de réclamer contre cet abus de la force. Le gouverneur français répondait évasivement, et n’en prenait pas moins toutes les mesures favorables