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LE ROSE ET LE VERT

çonné la vérité et sa visite faite à une heure de l’après-midi, c'est-à-dire aussi tôt après le diner de la veille que les convenances le permettaient, n'avait d’autre but que de s'assurer de la vérité.

Mina trouvait un plaisir intense à faire parler M. de Miossince. À chaque mot qu’il disait, ce digne homme prouvait à Mina apparemment que tous les Français n'étaient pas faits comme ceux de la veille.

L’être qui eût démontré cette vérité à Mina l’eût rendue bien heureuse. Or, c'est ce qu’après un quart d’heure de conversation, M. de Miossince lut dans son cœur. Il n'eut pas besoin d’une pénétration extraordinaire pour en venir à bout. Le cœur d’une jeune fille allemande est transparent pour ainsi dire, rien de plus facile pour l’homme habile appartenant à la civilisation française que de lire ce qui s'y passe. Mais aussi cet homme habile est souvent bien étonné de ne pouvoir deviner ses mouvements à venir. La véritable candeur échappe à l’esprit trop fin, appartenant à une civilisation trop raffinée[1].

M. de Miossince était connu dans le monde pour avoir refusé l’évêché de Meaux que le duc de Montenotte, son ami intime, avait demandé pour lui à Louis XVIII

  1. Dans la marge, au crayon : « Répété plus bas, ôter cela ici. » N. D. L. E.