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RACINE ET SHAKSPEARE

Aujourd’hui il n’y a plus de cour, ou je m’estime autant, pour le moins, que les gens qui y vont ; et en sortant de dîner, après la bourse, si j’entre au théâtre, je veux qu’on me fasse rire, et je ne songe à imiter personne.

Il faut qu’on me présente des images naïves et brillantes de toutes les passions du cœur humain, et non pas seulement et toujours les grâces du marquis de Moncade[1]. Aujourd’hui, c’est ma fille qui est Mademoiselle Benjamine, et je sais fort bien la refuser à un marquis s’il n’a pas quinze mille livres de rente en biens-fonds. Quant à ses lettres de change, s’il en fait et qu’il ne les paye pas, M. Mathieu, mon beau-frère, l’envoie à Sainte-Pélagie. Ce seul mot de Sainte-Pélagie, pour un homme titré, vieillit Molière.

Enfin, si l’on veut me faire rire malgré le sérieux profond que me donnent la bourse et la politique, et les haines des partis, il faut que des gens passionnés se trompent, sous mes yeux, d’une manière plaisante, sur le chemin qui les mène au bonheur.


  1. De l’École des Bourgeois.