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DE L’ÉDITEUR

assez fameuse, il n’avait que depuis peu dépassé la quarantaine, étant né, comme on sait, en janvier 1783. Expliquerons-nous ainsi qu’il ne fut jamais lui-même qu’un demi-romantique ? Sainte-Beuve, nous l’avons vu, le peint comme un hussard, un chevau-léger des idées d’avant-garde. Mais un hussard doit être jeune, ardent, pour être prompt à la riposte et excellent dans l’escarmouche. Déjà Beyle sentait le poids de l’âge et cet éternel amoureux craignait de voir bientôt close l’ère de sa jeunesse. Mais précisément parce qu’il avait atteint ces quarante ans fatidiques après quoi, de son propre avis, on n’a plus l’âme susceptible d’impressions vives, il fut moins ardent dans son dénigrement des idées anciennes, plus juste vis-à-vis de ses adversaires.

S’il s’en prend à Racine, c’est affaire de mode et il lui faut bien suivre le mot d’ordre. Il n’en parle néanmoins qu’avec mesure, parfois même avec sagesse. Il attaque bien plus les principes poétiques du xviie siècle que l’homme ou le poète comme Victor Hugo par exemple ne se gênera pas de le faire. Racine, explique-t-il, a écrit en son temps les œuvres qui donnaient le plus de plaisir à ses contemporains. Maintenant ses tragédies nous ennuient, mais, s’il eût vécu en 1820, il eût écrit tout autre chose. Stendhal ne proscrit donc pas Racine au nom de la