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DE LA LANGUE ITALIENNE

giques mises à la suite du nom d’un littérateur : l’un des quarante de l’Académie française.

Richelieu, en homme de génie qu’il était, ne donna pas pour but apparent à son Académie de produire des chefs-d’œuvre, mais de maintenir la pureté de la langue.

C’est ce petit mot, aidé de l’éclat du règne de Louis XIV, qui a fait de la langue française la langue de toute l’Europe. D’après les statuts de l’Académie française, un homme pouvait produire des chefs-d’œuvre, mais s’il avait voulu innover en fait de langue, si pour exprimer ses pensées et ses sentiments, il ne s’était pas servi des mots et des tournures convenus parmi ses compatriotes, enfin s’il avait voulu innover dans une chose qui, par la nature, est de convention, les portes de l’Académie lui restaient fermées, malgré tout son génie.

Loi admirable ! Ce n’est pas un petit mouvement de vanité qui fait enfanter des chefs-d’œuvre. L’homme de génie, tourmenté de ses idées, a plus besoin de prendre la plume que les êtres ordinaires de se mettre à table, mais il se dit : « Si l’Académie me déclare mauvais écrivain, personne ne me lira. »

Un auteur français qui a une idée à exprimer commence par chercher dans Montesquieu, Rousseau, Montaigne, La Bruyère, Fénelon, Bossuet, Voltaire, Buffon, Pascal et même dans tous les auteurs moins célèbres mais approuvés tels que Marmontel, Duclos, d’Alembert, Chamfort, etc…, le mot néces-