dans les procédures, et qui, bien que fortement éprouvé, avait cependant encore la force de parler. Tous les autres, pour mieux se livrer à leur attention profonde, se cachaient le front de la main, et, à l’interruption, aucun n’a fait de mouvement. Consterné de cet aspect, je regarde mon jeune avocat : « Les phrases élégantes que vous nous débitez, me dit-il, sont bonnes à être récitées dans une assemblée solennelle ; mais comment ne savez-vous pas qu’en petit comité il faut au moins une apparence de raison et de bonne foi ? Tant que l’on n’est que sept à huit, tout n’est pas excusé par la nécessité de faire effet ; chacun voit trop clairement, que personne n’est trompé. Dans une assemblée nombreuse, on pense toujours à Paris que l’autre côté de la salle est pris pour dupe et admire. Une séance de l’Académie est une cérémonie. L’on y arrive avec l’inquiétude de ne pas trouver de place ; rien en France ne dispose mieux au respect. Comment tant de gens s’empresseraient-ils pour ne voir qu’une chose ennuyeuse ? À peine rassemblé, le public s’occupe des femmes élégantes qui arrivent et se placent avec fracas ; plus tard, il s’amuse à reconnaître les ministres présents et passés qui ont daigné se faire de l’Académie ; il considère
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RACINE ET SHAKSPEARE