Page:Stendhal - Promenades dans Rome, tome 1.djvu/125

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les plus riches de Milan voyageait gaiement en poste avec un de ses amis ; la galanterie avait beaucoup de part à leur entretien, et, le voyage resserrant les nœuds de l’amitié, « je ne manquerai pas, à mon arrivée à Milan, de vous présenter à ma maîtresse, » disait le négociant à son ami. On arrive à Loreto. Quelle ne fut pas la surprise de Melchior Gioja quand il vit son ami tourner au sérieux tout à coup, dépenser vingt-deux napoléons d’or pour faire dire des messes pour le salut de sa maîtresse et pour sa bonne mort à lui, et emporter force chapelets ! Il ne reprit sa gaieté que vingt lieues plus loin, vers Pesaro.

Je serais obligé de faire du style pour donner une idée de ce que nous éprouvions, malgré nous, en revenant, à une heure du matin, à travers les bois, de la villa Aldobrandini à Grotta-Ferrata. Je gâterais, en essayant de le peindre, ce divin mélange de volupté et d’ivresse morale ; et, après tout, les habitants de l’Île-de-France ne pourraient me comprendre. Le climat est ici le plus grand des artistes.

Jamais nous ne nous serions doutés de ces sensations si nous avions vu l’Italie pendant l’hiver, ou seulement si nous fussions restés dans Rome.

1er septembre. — Nous sommes allés