Page:Stendhal - Promenades dans Rome, tome 1.djvu/120

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lesquels se trouve un grand homme, l’Arioste, et l’écrivain qui, à lui seul, forme l’opposition du siècle de Léon X, l’Arétin. Pendant que Raphaël peignait les stanze, Jules II appela Michel-Ange auprès de lui.

Les partisans de ce dernier furent les seuls ennemis de Raphaël ; mais Raphaël ne fut point le leur. On ne voit pas qu’il ait jamais haï personne, il était trop occupé de ses amours et de ses travaux. Quant à Michel-Ange, il ne comprenait guère le génie de son rival ; il disait que ce jeune homme était un exemple de ce que peut faire l’étude. C’est Corneille parlant de Racine. Raphaël fut toujours plein de respect pour l’homme étonnant que les intrigues de la cour de Rome lui donnaient pour rival. [Il remerciait le ciel de l’avoir fait naître du temps de Michel-Ange[1].] Michel-Ange, dont l’âme n’était pas aussi pure, faisait des dessins fort savants, sur lesquels il faisait appliquer des couleurs par fra Sébastien del Piombo, élève du Giorgion. On rencontre dans les galeries quelques tableaux créés ainsi ; ils montrent les corps et non les âmes ; chaque personnage a un peu l’air de ne s’occuper que de lui seul. Il y a quelque chose de David, et

  1. Cette petite phrase est une addition de l’édition Lévy d’après une note manuscrite de Stendhal sur l’exemplaire Serge André. N. D. L. E.