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thiens ; l’ordre du rez-de-chaussée est dorique, et celui du second étage ionique. Les trois premiers ordres se dessinent par des colonnes à demi engagées dans le mur, comme au nouveau théâtre de la rue Ventadour.

Le monde n’a rien vu d’aussi magnifique que ce monument : sa hauteur totale est de cent cinquante-sept pieds, et sa circonférence extérieure de mille six cent quarante et un. L’arène où combattaient les gladiateurs a deux cent quatre-vingt-cinq pieds de long sur cent quatre-vingt-deux de large. Lors de la dédicace du Colysée par Titus, le peuple romain eut le plaisir de voir mourir cinq mille lions, tigres, et autres bétes féroces, et près de trois mille gladiateurs. Les jeux durèrent cent jours.

L’empereur Vespasien commença ce théâtre à son retour de Judée ; il y employa douze mille Juifs, prisonniers de guerre ; mais il ne put le finir ; cette gloire était réservée à Titus, son fils, qui en fit la dédicace l’an 80 après Jésus-Christ[1].

Quatre cent quarante-six ans plus tard, c’est-à-dire l’an 526 de notre ère, les Barbares de Totila en ruinèrent diverses parties, afin de s’emparer des crampons de bronze qui liaient les pierres. Tous les blocs du Colysée sont percés de grands trous. J’avouerai que je trouve inexplicables plusieurs des travaux exécutés par les Barbares, et que l’on dit avoir eu pour objet d’aller fouiller dans les masses énormes qui forment le Colysée. Après Totila, cet édifice devint comme une

  1. Chercher au Musée, à Paris (no 1047), le tableau de Jules Romain, dont le premier plan peint si nettement la cérémonie du triomphe de Vespasien et de Titus, et l’arc triomphal sous lequel les Juifs prisonniers sont contraints de passer. Cette cérémonie était pour les peuples anciens comme serait aujourd’hui donner un soufflet à toute une armée, ou signer la capitulation de Baylen.