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pensées

mal joué à l’exception de la servante Claudine et du domestique Lubin, m’a représenté l’œuvre du grand Molière, son attention à ce que tout soit comique et profond et en général à comiquer tout, les choses nécessaires à sa pièce par les moyens les plus forceurs en apparence, disposé à goûter la peinture profonde des caractères, même manquant d’agrément, je lisais avec plaisir Caleb Williams de W. Godwin qui me paraît avoir cette qualité, je suis tombé volume III, page 58, sur cette phrase : « Si la fidélité et l’honneur étaient bannis de chez les voleurs où est-ce qu’ils (la fidélité et l’honneur) trouveraient un refuge sur la terre » ? qui me paraît devoir faire éclater le rire ; l’homme profond, l’homme à imagination et expérience rit des données comiques d’un caractère. Ce sont de telles saillies que Molière recherche et qui déterminent le rire universel d’une grande assemblée. Il faut que les saillies soient naturelles, autrement on voit l’auteur qui plaisante.

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Grande bamboche[1]. Mante et moi allons à sept heures chez Mme Cormic. Nous brûlons d’abord un verre de rhum. Nous

  1. 12 frimaire XIV.