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pensées

deuxième. Il avait une vingtaine de mille livres de rente, et avait toujours une excellente table. Un jour, sur le soir, ma grand’ mère et ses filles qui habitaient le premier entendirent la gouvernante de M. Bon qui jetait les hauts cris et appelait ; c’était son maître qui venait d’être atteint d’une attaque d’apoplexie. Mes tantes le soignèrent avec cette gouvernante, ce qui n’empêcha pas que deux heures après il n’expirât entre les bras de ma tante Chalvet. Aussitôt ma grand’mère qui était un peu piquon ferma toutes les armoires et mit une de ses filles en faction devant chacune d’elles. Cette précaution était d’autant plus nécessaire que dans un tiroir d’une armoire qui était dans la chambre du milieu il y avait des poignées d’or que M. Bon y jetait sans compter. Ma tante Chalvet se hâta de parcourir les chambres, elle ramassa son plein tablier de petits bijoux en or, vermeil, argent, tels que petits couteaux manches d’argent, ciseaux, étuis, etc., etc.

Bientôt après la justice arriva, et l’on mit les scellés partout.

Revenues chez leur mère, mes tantes se partageaient tous les petits bijoux de M. Bon. L’une disait : M…… (son héritier) me donnera ces jolis petits ciseaux ; l’autre : ce bel étui, ainsi de suite. Elles