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sa vue intellectuelle dans son commerce avec les cours, au lieu de l’avoir rétrécie. « Le nom ne fait rien à l’affaire » est un axiome que ses amis lui attribuent, et que ses ennemis, s’il en a, n’ont pas pris la peine de démentir. Que le mot soit vrai ou faux, c’est d’après ce principe qu’il agit. Il éprouve une sorte de jouissance à se débarrasser des dehors et de l’enseigne de ses fonctions. Rien ne peut surpasser la bienveillance naturelle avec laquelle il s’acquitte des devoirs de sa charge. Les solliciteurs et les visiteurs ne perdent rien à la métamorphose de l’ambassadeur en duc. Il a peu de chose à faire à Rome : les libertés de l’église gallicane sont admises, il n’est point tourmenté de toutes les craintes qui fatiguaient son prédécesseur. Ce n’est pas un crime de lèse-majesté de boire le vin et entendre la musique des Bonaparte. Le Palazzo Teodoli reconnaît les droits du Palazzo Luciano, leurs concierges se saluent mutuellement, et l’on a vu l’ambassadeur lui-même ôter son chapeau à une des plus jeunes et des plus belles détrônées. Ses attentions, surtout pour les dames, forment un contraste remarquable avec le ton dur et bourru de son devancier. Peu de gens ont autant de cette admiration et de ce dévouement pour le beau sexe, qui a fait si longtemps