Page:Stendhal - Pages d’Italie.djvu/325

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

maladie de Pinto, le ministre ordinaire, jointe à son grand âge, était un prétexte plausible pour prolonger le séjour de Condé en Italie, où il avait aussi, lui, d’autres points d’attraction. Il était franc et éclairé dans ses opinions politiques. Il avait le goût juste, et autant de passion que son parent[1] pour la culture des lettres et des beaux-arts. Je dînai souvent chez lui, un peu plus tard, au palais Fiano, et je vis réalisés à sa table quelques traits d’une utopie philosophique comme je l’aurais conçue. Il avait l’art et le mérite de réunir des hommes tels que Niebuhr, Akerblad, Sismondi et la libéralité d’appeler les autres à jouir de leur société et de leur instruction.

Dans le groupe du sopha dont j’ai déjà parlé, j’observai, quoiqu’un peu à part du reste, une tête fort remarquable, qui se détachait complètement des figures pâles et purement italiennes qui l’entouraient. Condé, démêlant sur mes lèvres une hésitation entre une question et un sourire, m’appela, et me présenta, sans autre préliminaire, à son ami. C’était « le ministre de sa majesté britannique le roi de Hanovre » : moyen ingénieux pour échapper à

  1. Éditeur de la magnifique édition du Camoens imprimée par Didot.