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à couper du bois, à puiser de l’eau, etc., etc.

Lorsqu’une bande stationne quelque part elle prend toutes les précautions de prudence dont use un corps armé en pays ennemi. Des sentinelles relevées à de courts intervalles sont placées sur les divers points par lesquels on pourrait être surpris. Ce préalable rempli, les bandits se divisent en groupes ; les uns jouent aux cartes, d’autres à la morra[1] ; ceux-ci dansent, ceux-là écoutent une histoire ou une chanson avec une insouciance et une sécurité complètes.

Dans le cours de sa vie aventureuse, deux choses dont il ne se sépare jamais rassurent le brigand italien : son fusil, pour défendre sa vie ; l’image de la Vierge pour sauver son âme. Rien de plus effrayant que ce mélange de férocité et de superstition ! Cet homme finit par se persuader que la mort sur l’échafaud, précédée de l’absolution donnée par un prêtre, lui assure une place dans le ciel. Souvent une semblable idée pousse un malheureux à commettre quelque crime entraînant la peine capitale, afin de mieux s’assurer un bonheur que le sacrifice de sa vie rend certain ! Enfin, ces gens-là vous assassinent très bien, le

  1. Jeu dans lequel les deux joueurs lèvent à la fois un certain nombre de doigts, et celui qui devine juste gagne la partie.