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donner une constitution aux approches de leur mort et réunir ainsi les avantages du vice et les honneurs de la vertu.

Le comte de Firmian fut secondé par deux milanais célèbres : le marquis Beccaria et le comte Verri. La guerre n’était point encore déclarée entre les peuples et les nobles, ceux-ci agirent dans le sens le plus libéral, et ce qui prouve qu’ils méritent la reconnaissance des nations, c’est qu’ils sont insultés dans cette rapsodie digne du xve siècle qu’on appelle la Biographie Michaud[1].

Beccaria secoua le joug d’une éducation fanatique. [Il] imprimait en 1761 : « À Milan sur une population de cent vingt mille âmes on trouve à peine vingt personnes qui aiment à s’instruire et qui sacrifient à la vérité et à la vertu. » Il donna en 1764 Les Délits et les Peines. Cet ouvrage si fameux, le précurseur de nos Codes, fut fait en deux mois. Mais l’auteur se garda bien d’y mettre son nom. La société de Berne décerna une médaille à l’auteur inconnu en l’invitant à se faire connaître. Aujourd’hui je ne lui conseillerais pas de coucher à Berne[2].

  1. Volume 4, p. 15. Tout mort qu’est l’auteur, il effraie encore les aristocrates. Un privilégié croit devoir l’attaquer à Paris, et aux lieux où il fut écrit la police en prohibe la vente.
  2. Voyez ce qui est arrivé à M. Thibaudeau et les écrits de M. de Haller.