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GEORGE DANDIN

Qu’est-ce qui peut porter à une telle action ? la vanité. Le ridicule[1] viendra donc de la déroute de cette passion. Molière ayant choisi de nous la montrer tout à fait vaincue a évité beaucoup de positions comiques.

Les trois désavantages énoncés ci-dessus, donnent :

1o Combat de la vanité et de l’avarice.

2o La vanité de George Dandin désappointée par les mépris de sa nouvelle société, mépris qui seraient intolérables même à une vanité ordinaire, et George Dandin n’en a pas encore fait le sacrifice, il joue encore le digne et l’heureux auprès du bedeau et du notaire de son village, s’il reste riche paysan ; auprès d’un provincial et d’un marchand de la rue Saint-Denis, si on le fait monter au rang de financier.

Cette vanité, battue dans tous les sens, donne une foule de positions comiques.

  1. Il y a une petite différence entre les désavantages et les ridicules. Par exemple le 1er  désavantage noté ci-dessus. « Être ruiné par une famille noble et pauvre à laquelle on s’allie » n’offre pas dans l’énoncé le moyen de faire rire. Il faut y ajouter : « Combat de la vanité et de l’avarice », qui sont ici les deux passions naturelles. Pourquoi a-t-on l’idée singulière d’épouser une fille noble ? Par vanité.

    Le premier travail : énoncer les désavantages, est celui du philosophe. Le deuxième : trouver le moyen de les exposer d’une manière claire et qui fasse rire, celui du comiqueur.

    (Cette petite réflexion avec son appareil d’ordre est assez commune et assez plate.)