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seul des historiens contemporains en qui j’aie foi[1].

M. Fauriel nous disait, ce me semble, que longtemps après eue le barbare Genséric eut pris et pillé Rome, le 12 juillet 455, Narbonne était restée romaine par les mœurs et la civilisation. Jules César et Tibère l’avaient embellie. Je me suis donc arrêté, quoique très pressé, afin de regarder un instant les murs de la ville, dans la construction desquels on a employé des pierres portant des inscriptions, des bas-reliefs, etc. J’ai appris à Aquileja, dans les environs de Venise, que lorsque les barbares plaçaient un bas-relief dans un mur, trouvant le côté plan de la pierre bien plus beau que l’autre, ils ne manquaient jamais de mettre à l’intérieur et de cacher le côté sur lequel il y avait des figures.

J’ai vu une belle tour et des églises ; j’ai sacrifié à la curiosité une heure prise sur mon sommeil. Le pays qui entoure Narbonne est désolé et sec ; c’est pis que la Provence. J’écris ceci à Sijean, en attendant le dîner. Je trouve dans les façons des habitants une nuance singulière c’est le

  1. M.Fauriel est mort à Paris le 14 juillet 1844,âgé de soixante-trois ans. Beyle fit sa connaissance vers la fin de 1799, et probablement chez la veuve de Condorcet,alors fort jolie,et auprès de laquelle M. Fauriel était très assidu (Note de Romain Colomb.)