rellement de leur union vive et solide ; l’abbé corrigeait les épreuves de l’évêque, et la petite Charlotte-Sophie Auger, nièce de ce dernier, était chargée, à sa grande satisfaction, de reporter au prélat toutes ses corrections ; c’était ma mère, qui à cette époque avait une dizaine d’années, et était bien la plus jolie petite brune, vive, sémillante et spirituelle qu’on pût voir. M. de Noé adorait cette petite, qui était enchantée, et s’informait toujours de son vénérable oncle, s’il y avait quelques épreuves à porter à monseigneur. Un jour du mois de février, le plus triste, et le plus ennuyeux et froid de l’hiver, l’oncle ordonna à sa petite favorite de porter les papiers d’usage ; ma bonne grand’maman l’enveloppa de sa pelisse fourrée, et la voilà partie. Arrivée au pas et au but de sa course, car la neige commença à tomber terriblement fort, monseigneur, qui attendait cet envoi, observait de ses fenêtres le charmant messager femelle.
Il l’aperçut qui franchissait le seuil de son hôtel, et descendit lui-même tête nue et sans crainte de se mouiller ; il s’avança dans la cour auprès de l’enfant, l’enleva, et lui ôtant de suite sa pelisse, il l’enveloppa de sa large soutane, et la porta ainsi jusque dans son cabinet, où un feu à pleine cheminée brillait de la clarté de la flamme pétillante qui s’en échappait. « Mais, ma chère enfant, lui dit-il, votre oncle vous prend donc pour une petite Lacédémonienne, de vous envoyer par le temps