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Pendant ce temps, Lucien suivait une négociation bien différente avec le vieux maréchal ministre de la Guerre, qui, toujours à la veille de perdre sa place depuis quatre mois, était encore ministre de la Guerre. Quelques jours avant la course à Versailles, Lucien avait vu entrer chez lui un des officiers du maréchal qui, de la part du vieux ministre, l’avait engagé à se trouver le lendemain au ministère de la Guerre, à six heures et demie du matin.

Lucien alla à ce rendez-vous, encore tout endormi. Il trouva le vieux maréchal qui avait l’apparence d’un curé de campagne malade.

— Eh bien ! jeune homme, lui dit le vieux général d’un air grognon, sic transit gloria mundi ! Encore un de ruiné. Grand Dieu ! on ne sait que faire de son argent ! Il n’y a de sûr que les terres, mais les fermiers ne paient jamais. Est-il vrai que vous n’avez pas voulu faire banqueroute, et que vous avez vendu votre fonds 100.000 francs ?

— Très vrai, monsieur le maréchal.

— J’ai connu votre père, et pendant que je suis encore dans cette galère, je veux demander pour vous à Sa Majesté une place de six à huit mille francs. Où la voulez-vous ?

— Loin de Paris.